les arts trompeurs, journée 3
Performance sans performance. La magie entre art et technique
Thibaut Rioult (doctorant, ENS Ulm)
L’effet magique est la conjonction d’un phénomène et d’un cadre d’interprétation.
Mettre en scène et,
surtout, faire vivre au spectateur une expérience magique, nécessitent le recours aux deux
composantes essentielles de l’illusionnisme : l’art et la technique.
Ces deux dimensions trouvent leur
apogée en deux moments particuliers : celui de l’illusion et celui de l’émerveillement, que résume la
polarité invisible – visible. Chaque performance est alors mise en demeure de se positionner par
rapport au degré de visibilité de la dimension technique.
Ce couple peut être incarné par deux
magiciens télévisuels des années 70 : Gérard Majax qui anima le jeu télévisé Y a un truc (1975) et mit
l’accent sur le trucage et Jacques Delord qui s’occupa des Ateliers du magicien (1975) en insistant sur la
poétique magique.
Comment cette différence radicale de vue se traduit pratiquement ?
Quelles sont
les conséquences de ces orientations, d’abord dans le cadre spectaculaire, puis d’une manière générale
dans l’image et l’imaginaire de la magie qu’elles contribuent à forger ?
Entre magie télévisée et magie télévisuelle
Marie-France Chambat-Houillon (MCF-HDR, Université Paris 3)
Depuis les débuts de la télévision française, la magie a toujours occupé une place dans la
programmation du divertissement de ce média.
Une cartographie des différentes émissions de magie
permet de distinguer entre « magie télévisée » et « magie télévisuelle » et de saisir comment ces
programmes oscillent entre emprunt intermédial et invention télévisuelle lors de la représentation des
numéros de magie.
Outre une attention portée aux thématiques et aux dispositifs, les choix énonciatifs
des émissions seront aussi étudiés.
Si s’avère une spécificité télévisuelle des façons de filmer la magie,
elle s’inscrit paradoxalement dans un cadre discursif où ce média promeut généralement transparence
et monstration.
Or ces caractéristiques de l’énonciation télévisuelle sont contraires au principe de
l’illusion magique en tant que soustraction de « trucs » au visible.
Magie et sérialité
Mathieu Pierre (Docteur, Université Paris 3)
En 1916, Theodore et Leopold Wharton produisent The Mysteries of Myra, premier et quasiment seul
serial totalement fantastico-magique.
Près de vingt ans plus tard, The Return of Chandu (1934) de Ray
Taylor lui succédera.
La particulière originalité de The Mysteries of Myra est d’avoir est eu recours à
deux figures importantes de l’occulte : Hereward Carrington en tant que consultant en spiritualisme et
Aleister Crawley pour ce qui avait trait à la magie, établissant dès lors un lien indéfectible, que nous
étudierons ici, entre la magie et la sérialité, encore très présent dans nos séries télévisées
contemporaines (Buffy, Charmed, The Magicians).
L’artiste en magicien à la télévision
Clémence de Montgolfier (Doctorante, Université Paris 3)
Cette communication vise à définir et à analyser la figure de l’artiste en magicien à la télévision
française et ses enjeux, à partir d’exemples choisis parmi un corpus de programmes télévisés diffusés
en France allant de 1960 jusqu’à nos jours.
Dans un premier temps, on se concentrera sur la
représentation de l’artiste-plasticien contemporain et on discernera un motif narratif issu des récits de
vies d’artistes depuis l’Antiquité (Kurz, Kris, 1979) : celui de l’artiste en magicien.
On s’interrogera,
dans un deuxième temps, sur deux créateurs de programmes télévisés qui sont apparus comme des
« manipulateurs » de la télévision et chez qui le « mode magique » comporte un aspect réflexif du
médium sur lui-même.
D’ abord, Jean-Christophe Averty, réalisateur, qui utilisait les trucages
apparents et le registre visuel de la magie comme un élément d’humour satirique dans ses émissions
(Duguet, 1991). Puis, Michel Jaffrennou, artiste multimédia, qui réalisait des mises en abîme visuelles
entre le réel et son image par le biais de l’écran (Hillaire, 1991).
Les archives de Michel Jaffrennou
Alain Carou (Conservateur, Bibliothèque nationale de France) et Sylwia Frach (Docteure, Université Paris 3)
Michel Jaffrennou apporte beaucoup à la connaissance d’un artiste qui a pu être qualifié de « Méliès
de la vidéo » pour son usage illusionniste des écrans cathodiques.
Si Michel Jaffrennou revendique
une prédilection pour le cabaret et les spectacles d’attractions, son travail sur les « effets magiques »
est aussi une mise à l’épreuve des dispositifs audiovisuels.
Des Toto-logiques (1979)
à Vidéopérette (1989), on proposera un parcours dans ces archives.
Échange avec Michel Jaffrennou